BAC BLANC N°1 : ÉPREUVE DE PHILOSOPHIE (
17.01.2011)
Traitez au choix l’un des sujets suivants :
Sujet 1 :
Quelle conception de l’homme l’hypothèse de l’inconscient remet-elle en cause ?
Sujet 2 :
Peut-on refuser l'idée d'inconscient psychique ?
Expliquez le texte suivant :
L’homme, quelque rabaissé qu’il soit au-dehors, se sent souverain dans sa propre âme. Il s’est forgé quelque part, au cœur de son moi, un organe de contrôle1 qui surveille si ses propres émotions et ses propres actions sont conformes à ses exigences. […] Dans certaines maladies et, de fait, justement dans les névroses2, que nous étudions, il en est autrement. le moi se sent mal à l'aise, il touche aux limites de sa puissance en sa propre maison, l'âme. Des pensées surgissent subitement dont on ne sait d'où elles viennent ; on n'est pas non plus capable de les chasser. Ces hôtes étrangers semblent même être plus forts que ceux qui sont soumis au moi.[...]
La psychanalyse entreprend d'élucider ces cas morbides3 inquiétants, elle organise de longues et minutieuses recherches, elle se forge des notions de secours et des constructions scientifiques, et, finalement, peut dire au moi : « Il n'y a rien d'étranger qui se soit introduit en toi, c'est une part de ta propre vie psychique qui s'est soustraite à ta connaissance et à la maîtrise de ton vouloir. [...]
« La faute, je dois le dire, en revient à toi. Tu as trop présumé de ta force lorsque tu as cru pouvoir disposer à ton gré de tes instincts4 sexuels et n’être pas obligé de tenir compte le moins du monde de leurs aspirations. Ils se sont révoltés et ont suivi leurs propres voies obscures afin de se soustraire à la répression, ils ont conquis leur droit d’une manière qui ne pouvait plus te convenir5. […] »
« Tu crois savoir tout ce qui se passe dans ton âme, dès que c'est suffisamment important, parce que ta conscience te l'apprendrait alors. Et quand tu restes sans nouvelles d'une chose qui est dans ton âme, tu admets, avec une parfaite assurance, que cela ne s'y trouve pas. Tu vas même jusqu'à tenir psychique pour identique à conscient, c'est-à-dire connu de toi, et cela malgré les preuves les plus évidentes qu'il doit sans cesse se passer dans ta vie psychique bien plus de choses qu'il ne peut s'en révéler à ta conscience. Tu te comportes comme un monarque absolu qui se contente des informations que lui donnent les hauts dignitaires de la cour et qui ne descend pas vers le peuple pour entendre sa voix. Rentre en toi-même profondément et apprends d'abord à te connaître, alors tu comprendras pourquoi tu vas tomber malade, et peut-être éviteras-tu de le devenir. »
C'est de cette manière que la psychanalyse voudrait instruire le moi. Mais les deux clartés qu'elle nous apporte : savoir que la vie instinctive de la sexualité ne saurait être complètement domptée en nous et que les processus psychiques sont en eux-mêmes inconscients, et ne deviennent accessibles et subordonnés au moi que par une perception incomplète et incertaine, équivalent à affirmer que le moi n'est pas maître dans sa propre maison .
FREUD
« Une difficulté de la psychanalyse »,
in Essais de Psychanalyse appliquée.
NOTES :
1. La conscience.
2. Troubles obsessionnels, compulsions, angoisse, phobies, etc ou encore troubles hystériques.
3. Qui concernent la maladie.
4. « Trieb » en allemand, que l’on traduit plutôt par le terme de pulsion (latin pulsio, « poussée »).
5. Allusion au symptôme névrotique.
La connaissance de la doctrine de l'auteur n'est pas requise. Il faut et il suffit que l'explication rende compte, par la compréhension précise du texte, du problème dont il est question.
Bon courage.